Young Harts - Truth Fades (2019)

2019/Plusieurs labels*

Alors celle-là, je l'ai pas vue venir, et on va être un paquet à tomber des nues dans les prochains mois en découvrant ce magnifique premier album des Clermontois, ou en ayant la chance de les apprécier sur scène. Rencardé par Quentin de Fire At Will lors de leur passage en terre boulonnaise en compagnie des nordistes de Drawbacks (reviews des deux formations déjà ou bientôt dispo sur Perfidalba), j'ai pu avoir le privilège de me passer en boucle les pépites de Truth Fades, sorti au début du mois par une dizaine de labels (voir ci-dessous), dont Eternalis, le label de Quentin, qui a également sorti le premier full-length de Drawbacks. Assénant un punk-rock classieux et élégant (à tel point qu'on se sent parfois bien loin du genre popularisé par les Sex Pistols, les influences indé y étant pour beaucoup), Young Harts nous conquiert en l'espace de quelques secondes, le temps pour "Singled Out" de se mettre en jambes. Quand le puissant refrain se met à sévir, on sait déjà qu'on n'a pas souvent l'occasion d'entendre une musique à la fois si incisive et entêtante. C'est décidé, on va être copains.

Tout ça, c'était avant le drame. Enfin, surtout avant de se rendre compte que le côté profondément mélancolique de "Figure Out This" est renforcé et magnifié par quelque chose... Mais par quoi ? Ce n'est qu'après l'écoute (quasi) complète du disque (une pure partie de plaisir, soit dit en passant, au cours de laquelle une ribambelle d'émotions se sont élevées, percutées et projetées un peu partout dans la pièce) que le verdict me saute aux oreilles... Alors que différents genres, styles, chapelles ont été progressivement effleurés, le classic rock (mutant) de "Loyalty Through Time", l'avant-dernière piste, me donne la solution : on jurerait entendre Joakim Nilsson, l'inimitable (et pourtant...) vocaliste des inénarrables (et pourtant...) hard-rockeurs scandinaves de Graveyard ! Rien moins qu'un groupe et un chanteur mythiques, donc. Qu'il s'agisse d'une coïncidence ou que cela s'explique par le cheminement et les influences de Chris (le frontman, vous aurez compris) importe peu : c'est beau, ça donne encore plus de cachet aux compos de Young Harts, qui n'en manquait pas, et on en redemande !

Au final, les Clermontois se promènent au gré de leurs envies à travers une multitude d'univers (rock, punk, indie, post-punk, power-pop, folk, nougat, cacahuètes pralinées) et se foutent pas mal de savoir quelle est la teneur exacte de leur musique, se préoccupant uniquement de sa qualité. Bien malin qui pourrait répondre à cette question, qui en appelle surtout une autre : est-ce important de se soucier des étiquettes quand une troupe d'artistes vous concocte un tel brûlot ? L'absence d'appartenance à une caste clairement délimitée peut parfois jouer sur une carrière, sur la réussite commerciale, mais les Young Harts ne semblent pas rencontrer de difficultés à trouver le sommeil à cause de tels détails. L'essentiel est qu'on ait l'impression d'avoir quatorze balais à nouveau, et de ressentir les mêmes émois que nos premières salves rock ont pu éveiller sur nous à l'époque, du fun des formations de punk à roulettes à la schizophrénie de Nirvana, en passant par la coolitude d'un Weezer ou le côté alambiqué du rock indé des Radiohead et consorts. Jonathan et Jennifer peuvent eux aussi dormir tranquilles : on trouve encore, au sein de la nouvelle génération, des zikos qui n'ont pas peur de s'affranchir des frontières et de pratiquer leur art (brillant) au mépris du danger... Pour l'amour du risque.

Syl Alba

*Asso Page Blanche, Bad Mood Asso, Bad Health Records, Crapoulet records, Dingleberry Records, Eternalis Records, Fireflies Fall, Fond Of Life Records, Inhumano, Joe Cool Records, K-Nardage Asso, Opposite Prod, TimTam Records

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